Abdelhamid Benazzouz, spécialiste de la maladie de Parkinson
Directeur de recherche à l’Inserm, Abdelhamid Benazzouz est aussi à la tête de l’équipe de recherche Neurochimie, stimulation cérébrale profonde et maladie de Parkinson à l’Institut des maladies neurodégénératives (IMN) [1] de Bordeaux. Neurobiologiste et neurophysiologiste, il travaille depuis le début de sa carrière sur la maladie de Parkinson.
Après avoir obtenu son baccalauréat scientifique au Maroc, Abdelhamid Benazzouz intègre la faculté des sciences de Tétouan, dans le nord du Maroc, où il obtient sa licence, en physiologie animale. Souhaitant devenir chercheur, il quitte son pays d’origine pour poursuivre ses études en France, à Bordeaux, où il effectue un diplôme d’études approfondies (DEA), l’équivalent d’un master, en neurosciences. Abdelhamid Benazzouz obtient ensuite un doctorat spécialisé en neurosciences et pharmacologie à l’université de Bordeaux. Pendant sa thèse, il devient un des pionnier·ères de la méthode de « stimulation haute fréquence du noyau sous thalamique » chez le primate, approche efficace pour améliorer les symptômes moteurs de la maladie de Parkinson. Ce travail, lui ouvre les portes d’un laboratoire à l’Université Joseph Fourier dans la ville de Grenoble, où il réalise son rêve, celui de tester son approche thérapeutique aux patient·es parkinsonien·nes. En 1998, Abdelhamid Benazzouz intègre l’Inserm, institut de recherche dédié à la recherche biologique, médicale et à la santé humaine, en tant que chargé de recherche. Depuis 2005, il est directeur de recherche à Bordeaux et chef de l’équipe neurochimie, stimulation cérébrale profonde et maladie de Parkinson de l’Institut des maladies neurodégénératives de Bordeaux.
Guidé par ses passions
Dès son plus jeune âge Abdelhamid Benazzouz est attiré par les sciences et le métier de chercheur·e « J’adorais regarder les films qui parlaient de la recherche » nous confie le chef d’équipe. Souhaitant « apporter quelque chose » et « rendre service à l’humanité », c’est tout naturellement qu’il emprunta la voie de la recherche biomédicale. Conscient de la difficulté à devenir chercheur, métier qu’il souhaitait tant exercer, ainsi que du faible nombre de postes disponibles, il mit toutes les chances de son côté pour réussir, en quittant son pays d’origine pour étudier en France. Être chercheur, c’était une évidence pour Abdelhamid Benazzouz : « J’avais deux passions quand j’étais jeune, la recherche et la musique. La recherche l’a emporté. » nous confie-t-il.
Sa thèse, là où tout commence
Pour effectuer sa thèse, Abdelhamid Benazzouz intègre le laboratoire du professeur Bioulac, qu’il considère comme une référence dans le domaine de la recherche biomédicale : « il travaillait sur des pathologies humaines et sur des primates, modèles intéressants, parce que ces animaux permettent d’appliquer les résultats obtenus à l’Homme, très facilement » nous explique le chercheur. C’est donc à cet instant que la carrière d’Abdelhamid Benazzouz prend la voie de la recherche sur la maladie de Parkinson. Pendant sa première année de thèse, il travaille aux côtés de Christian Gross, chercheur en neurophysiologie, sur les symptômes moteurs de la maladie de Parkinson. Plus particulièrement, sur leur diminution, grâce à la technique de greffe de neurones mésencéphaliques embryonnaires. Sans résultats concluants, cette thématique de recherche n’a pas abouti et s’est arrêtée avant la phase d’application à l’humain·e.
Pendant la deuxième partie de sa thèse, ses recherches se sont orientées vers une autre technique, la stimulation électrique à haute fréquence du noyau sous-thalamique, « une toute petite partie cérébrale » ajoute Abdelhamid Benazzouz. Cette approche, fructueuse, menée sur un modèle animal, lui ouvre les portes d’un post-doctorat à Grenoble. C’est dans une unité Inserm de l’université Joseph Fourier, où il travaille avec le neurochirurgien Alim Louis Benabid, que ses recherches seront transposées aux patient·es atteint·es de la maladie de Parkinson. Aujourd’hui cette méthode, qui permet de réduire de façon spectaculaire les symptômes moteurs de la maladie, est mondialement utilisée dans les Centres hospitaliers universitaires et permet d’améliorer la qualité de vie des patient·es parkinsonien·nes.
Étudier la maladie de Parkinson
Depuis sa première année de thèse jusqu’à aujourd’hui, Abdelhamid Benazzouz n’a jamais changé de sujet de recherche : « J’ai tout fait autour de Parkinson et j’essaie de créer une histoire sur cette maladie. » ajoute le chercheur. Actuellement à la tête de l’équipe neurochimie, stimulation cérébrale profonde et maladie de Parkinson à l’IMN, les recherches du chef d’équipe sont désormais axées sur les symptômes qui n’ont pas de traitement. L’équipe de recherche travaille en grande partie sur les symptômes non moteurs et plus particulièrement sur « la douleur insupportable » que peuvent ressentir certain·es patient·es parkinsonien·nes.
L’objectif premier de l’équipe est de comprendre pourquoi certain·es patient·es ont des douleurs, pour pouvoir par la suite trouver des solutions thérapeutiques ayant pour but d’améliorer grandement leur qualité de vie. Même s’i·elles ont des pistes « vraiment très prometteuses » leurs recherches en sont toujours à la phase d’expérimentation sur le modèle animal et non sur l’humain·e. L’équipe de recherche d’Abdelhamid Benazzouz a une autre mission, étudier la diversité des symptômes chez les patient·es, pour mieux les connaître. Leurs recherches sont importantes car elles ont divers impacts sociétaux majeurs : améliorer la qualité de vie des patient·es et des aidant·es, alléger les prises en charges et les coûts des traitements et des actes chirurgicaux.
Être un chercheur et un chef d’équipe
« La liberté qui n’a pas de prix » offerte par son statut de chercheur et de chef d’équipe, voilà ce qui plait le plus à Abdelhamid Benazzouz. Cette liberté si précieuse qui lui permet de choisir les thématiques de recherche qu’il souhaite étudier et les approches qu’il veut utiliser, possède néanmoins un prix. Pour pouvoir se lancer dans un processus de recherche il faut obtenir des financements « et ce n’est pas toujours tout rose » ajoute Abdelhamid Benazzouz, mais le plus important dans ce domaine c’est que pour obtenir des résultats « il ne faut pas compter ses heures » nous confie-t-il.
Conscient de la difficulté du métier et de la persévérance qu’il faut pour obtenir des résultats positifs, il accorde un point d’honneur à aider les jeunes, à les motiver, pour qu’i·elles continuent dans la voie de la recherche. Comparant son équipe à « une petite famille » le chercheur met en avant l’importance du travail collectif et de l’entraide, leur permettant de faire face à la pression constante qu’ils subissent, et nécessaire à l’aboutissement de leurs travaux.
Continuer de faire avancer la recherche
Concernant la suite de leurs recherches, leur raisonnement sera constamment le même : « comprendre des mécanismes, apporter des traitements thérapeutiques » toujours avec l’intention première d’améliorer la qualité de vie des patient·es Parkinsonien·nes. La maladie de Parkinson est loin d’être totalement comprise et la recherche sur ses symptômes est loin d’être terminée « il y a encore énormément de questions auxquelles on veut répondre et on va tout faire pour y répondre » ajoute Abdelhamid Benazzouz.
Le chef d’équipe souligne l’importance de la technologie dans l’avancée de la recherche « cette évolution technologique qui va vite, c’est grâce à elle qu’on a des outils de pointe et qu’on peut répondre à des questions et faire avancer la recherche. » Aidé·es par les avancées technologiques et poussé·es par leur envie de faire avancer la recherche, Abdelhamid Benazzouz et son équipe vont poursuivre sur la même voie.
Johanna BERMUDES
« Je n’aurais pas été là si…
… je n’avais pas été soutenu par mes parents, qui m’ont toujours poussé à faire des études, au plus loin possible, mon épouse et mes deux filles qui m’ont toujours soutenu et qui ont supporté mes absences. Je pense aussi à quelque chose d’important, je n’aurais pas été là si je n’étais pas venu en France. Parce que la France m’a ouvert beaucoup de portes pour faire de la recherche, parce que je suis sûr que si j’étais resté au Maroc je n’aurais pas fait de la recherche comme je la fais actuellement. Je pense que c’est partagé, la France m’a apporté énormément mais je pense aussi que j’ai beaucoup apporté à la France parce que tout ce que je découvre est français. »
[1] L’IMN est un laboratoire du CNRS et de l’université de Bordeaux.